Quelle est l’origine des Abbayes?
Les Abbayes ont une longue histoire presque aussi vieille que notre Confédération helvétique, vous trouverez du reste plus d'informations sur les abbayes via le lien suivant: https://www.vd.ch/.../pratiques.../belle-saison/abbayes-tir/.
Pendant des siècles, les abbayes vaudoises ont vécu sans lien organique, sous la tutelle plus ou moins débonnaire des comtes de Savoie, puis de LL.EE. de Berne. Cette absence de structure formelle s’est prolongée après la création du Canton de Vaud, jusqu’au XXe siècle.
Avec les Abbayes vaudoises, nous entrons dans un royaume d’initiés. Partout ailleurs, une abbaye évoque des religieux paisibles, retirés dans des lieux de culte consacrés à la prière et à la médiation. Le Pays de Vaud fait exception ! Ici, le terme signifie fête populaire, concours de tir et vin coulant à profusion. Dans un monde en perpétuelle évolution, le maintien de cette coutume originale est un phénomène digne d’admiration et d’intérêt.
Au-delà d’une tradition sympathique, fidèlement conservée, on découvre un organisme toujours vivace qui se développe, se scinde, se fusionne et meurt parfois ici, pour mieux renaître ailleurs. Cette vitalité exceptionnelle a déjà intrigué bien des chercheurs et les raisons invoquées sont multiples : caractère typique des Vaudois, conservatisme lié à une structure cantonale encore largement agricole, instinct grégaire, etc. Nul doute que ces éléments ont joué leur rôle dans le maintien de cette forme d’association volontaire.
Mais on ne peut expliquer cette particularité vaudoise sans remonter dans le temps. Au cours du Moyen Age, les Comtes de Savoie avaient organisé dans leurs villes et bourgades des milices de tireurs à l’arc, puis d’arquebusiers, prêtes à assurer instantanément l’autodéfense des localités et le maintien de l’ordre public. Au besoin, les hobereaux locaux pouvaient y recruter leur « ost », leur contingent de soldats entraînés pour les suivre dans leurs chevauchées guerrières. Ces prestations paramilitaires, en principe volontaires et honorifiques, comportaient certains privilèges et avantages, tels que des prix aux meilleurs tireurs et des dispenses d’impôts ou de corvées.
Les milices du Pays de Vaud conservent leur caractère purement local et seigneurial jusqu’à l’époque décisive de son histoire, le premier tiers du XVIème siècle, où se conjuguent la conquête bernoise et l’introduction de la Réforme. Le nouveau gouvernement tenait à protéger des institutions utiles et à intégrer ces groupements de tireurs dans sa politique de défense globale, en harmonie avec la pratique helvétique.
A l’origine, les Cantons suisses, avec leurs alliés et sujets, s’étaient dotés d’une structure de milices, englobant tous les hommes libres valides de 16 à 60 ans, paysans, bourgeois ou nobles. Le Convenant de Sempach, en 1393, avait posé les bases de l’instruction militaire générale et des principes d’une stricte discipline. Durant toute la période « héroïque » de l’histoire suisse, qui se termine en 1515, l’armement de l’infanterie : grandes hallebardes, longues piques de 16 à 18 pieds et lourdes épées à deux mains, exigeait autant d’exercices d’entraînement que les armes de jet, arcs ou arbalètes. Les garçons de 8 à 16 ans se préparaient déjà à l’instruction militaire par des exercices de tir ou du maniement de la pique et de l’épée, sous le contrôle d’anciens soldats qui servaient d’instructeurs.
Avec la généralisation des abbayes au XVIIème, les tirs dotés de privilèges devinrent l’exception. Certes, le bailli ou son représentant étaient invités à la fête et à donner une certaine somme destinée au roi du tir, ou même à offrir une collation à l’assemblée. Mais dans bien des cas, la fortune propre des abbayes suffisait pour multiplier le nombre des prix jusqu’à permettre de distribuer à l’ensemble des membres un cadeau-souvenir de la manifestation. Par contre, le roi lui-même obtenait plus de privilèges personnels, en sus de son prix. Du reste, les plus anciens statuts l’attestent, on sent une volonté de maintenir un esprit très égalitaire au sein ces abbayes. Le terme utilisé de « confrères » et l’élection annuelle des principaux responsables, à l’exception parfois de l’Abbé-Président, le prouvait aussi. Dans les villes et bourgades dotées par les Bernois d’une milice militaire très structurée, les abbés avaient tendance à être choisis parmi les officiers, représentants des familles patriciennes qui faisaient partie des abbayes. Mais ces choix, ainsi que ceux des secrétaires et des censeurs-trésoriers, étaient soumis à un vote majoritaire de l’assemblée. Certains postes honorifiques, tels les capitaines ou lieutenants porte-drapeau, faisaient l’objet d’enchères, afin d’augmenter le trésor commun.